Avant de continuer, j’aimerais d’abord informer que ceci la continuation de mon étude de l’univers de We Happy Few et n’est pas une critique du jeu en tant que tel. Si vous n’avez pas encore lu la première partie de mon analyse, je vous invite fortement à le faire. Pour voir la critique, je vous invite à aller lire l’article de Jonathan sur le sujet. De plus, le jeu est en accès anticipé et certains points que je vais aborder peuvent changer au courant du développement du jeu. Certains éléments ont déjà changé depuis le début de l’écriture de cet article; il faut donc rester alerte quant aux prochaines mises à jour.
Parlons des Wastrels
Les Wastrels sont des personnes qui ont mal réagi à la joy, causant peut-être des dommages irréversibles. Leur folie serait causée par la composition des joy déjà disponibles sur le marché. Elles deviennent paranoïaques, saignent et cherchent à se protéger de dangers multiples, existants ou non. Contrairement aux downers, ils n’ont pas fait le choix d’arrêter la joy. C’est impossible, pour elles, de voir le monde paradisiaque que les gens normaux voient. J’ai la conviction, également, que ce n’est pas la joy qui les rend de cette façon, mais bien le fait qu’elle ne fait plus effet.
Que ce soit des dommages chimiques et permanents qui se sont faits au cerveau ou encore, la confrontation avec la réalité, je crois que le symbole revient au même : la réalité est matière à faire virer fou. Ils ne peuvent pas s’en distraire, donc tombent dans un monde imaginaire, un monde de folie.
La joy et le monde parfait
La joy, ce bonheur illusoire, crée la « folie » dans la psyché des personnages qui la prennent pour trop longtemps, comme on l’a mentionné plus tôt. Dans tous les villages de Wellington Wells, elle est disponible. Dans certains villages, en plus, elle n’est pas seulement sous la forme de capsule qu’on doit prendre toutes les heures. Elle est dissoute partout. Dans l’eau potable venant du robinet, il y en a. Dans n’importe quel plat, préparé à la maison ou dans les restaurants, il y en a. Dans n’importe quel aliment acheté, il y en a.
À ce moment, on peut tenir pour acquis que certaines personnes naissent dans un univers dans lequel ils ont toujours pris de la joy, donc, qui croient que ceci est la réalité. Ça nous rappelle un peu La Matrice, lorsqu’on apprend, en fait, que les humains sont dans un programme et que ce n’est pas la réalité. Autrement dit, cette drogue, c’est la création d’un paradis pour toutes les personnes qui décident de vivre ce mode de vie. Ils n’ont aucune crainte, mangent à leur faim. Mais ce n’est qu’en surface que ce monde est un paradis. Au lieu de remettre le monde et le mode de vie en question, on répare, on patch, par l’illusion.
Peut-être même qu’il y a un parallèle direct avec notre monde et le nombre de dépressions qui augmente chaque année : à la place de remettre le mode de vie en question, on fixe les individus avec des médicaments. Évidemment, la dépression est quelque chose de beaucoup plus compliqué que cela et je crois, justement, que le jeu pourrait tenter de remettre la cause (le mode de vie) en question et pas la conséquence (la dépression). Cependant, je n’explorerai pas, pour l’instant, cette possibilité, car on se lance dans une seconde tâche exhaustive qui mérite une étude profonde.
Le choix de porter le masque
Comme je l’ai mentionné plus tôt, l’esthétique du masque n’a probablement pas été choisie, selon moi, sur un coup de tête. Au début du jeu, on aperçoit que tous les personnages qui sont à l’extérieur du Garden District portent un masque. J’ai remarqué plusieurs caractéristiques sur ce dernier, qui ne font que renforcir l’idée de conformité et de bonheur illusoire. La première caractéristique est que le masque a toujours une expression de sourire et peut devenir malaisante, voire même épeurante, si une personne fronce les sourcils et garde quand même ce sourire.
C’est là qu’on peut voir l’identité personnelle s’évanouir. Tout le monde est derrière un masque, on cache le fond de tout le monde et on les réduit au bonheur qu’ils sont obligés de vivre. Je ne crois pas que personne ne force personne à porter ces masques d’ailleurs. Tout le monde doit prendre de la joy, mais il n’y a pas (encore) d’indice que les gens doivent porter ces masques. Je crois, en fait, que c’est par conformité que tout le monde le porte, afin de ne pas trop détonner par rapport aux autres et d’être accepté par ces derniers.
En fait, je trouve ça symbolique de cacher l’identité avec un masque qui sourit : le sourire cache l’identité, le sourire cache les souffrances. Je crois, ici, que le symbole derrière tout cela est que les personnes ont perdu leur identité individuelle lorsqu’elles ont renoncé à leurs souffrances. Ça me rappelle ce que disait Nietzsche par rapport à celles-ci. Dans Le gai savoir, le philosophe indique que seule [une] grande douleur, longue et lente oblige à atteindre l’ultime profondeur de soi-même. Il dit douter par rapport à savoir si ça améliore la personne (le philosophe) qui la subit, mais qu’en tous les cas, ça approfondit celui/celle qui la subit. Je crois que ce qu’on essaie de dire dans le jeu, c’est que ce sont les souffrances qui forgent l’identité d’un individu; donc, c’est ce qui nous distingue les uns des autres.
Le logo du jeu vient aussi renforcer cette idée. On voit un masque brisé : juste au niveau du sourire, il éclate en dizaines de petites pièces. On fait éclater le masque et c’est là que l’aventure commence.
La fin dans un autre article
Pour l’instant, arrêtons-nous là! Dans le prochain article, je terminerai mon analyse philosophique de We Happy Few en faisant un parallèle entre le jeu et notre vie quotidienne. Gardez l’oeil ouvert pour une belle conclusion!