Analyse du jeu We Happy Few – Partie 2 : Vérité et choix de l’illusion

We Happy Few - On vous observe!

Avant de continuer, j’aimerais d’abord informer que ceci la continuation de mon étude de l’univers de We Happy Few et n’est pas une critique du jeu en tant que tel. Si vous n’avez pas encore lu la première partie de mon analyse, je vous invite fortement à le faire. Pour voir la critique, je vous invite à aller lire l’article de Jonathan sur le sujet. De plus, le jeu est en accès anticipé et certains points que je vais aborder peuvent changer au courant du développement du jeu. Certains éléments ont déjà changé depuis le début de l’écriture de cet article; il faut donc rester alerte quant aux prochaines mises à jour.


https://youtu.be/DitvMqqq-Vk

Il y a une appellation pour le monde qui décide d’arrêter de se droguer et de voir la réalité comme elle est. Les downers sont des personnes qui, ne prenant pas leur joy, sont devenues folles. Ce qui m’a frappé, c’est qu’il y a une appellation pour ceux qui refusent de prendre leur drogue, mais qu’il n’y en pas pour les personnes qui la prennent (autre que l’appellation des résidents et des résidentes, appelés respectivement Wellies et Wellers, mais c’est le nom qu’on donne aux habitants de l’endroit). Ça donne un aspect de correct à ceux et celles qui en prennent. Une personne n’ayant aucun problème majeur, aucune différence, sera, et je n’aime pas cette appellation, Normale.  On ne nomme pas les personnes normales, et ce, peu importe l’univers.

Encore une fois, ce choix esthétique semble être une critique, semble avoir un but. Après tout, n’est-ce pas les downers qui voient le monde tel quel? Il n’est pas possible, encore, de confirmer s’il y a plus de downers que de personnes normales, mais ils semblent être regroupés principalement à l’entour du premier endroit dans lequel nous atterrissons après l’introduction : Le Garden District.

 

La folie de celui qui ouvre ses yeux

Il est important de noter que je fais une distinction entre les Wastrels et les downers. Je reviendrai aux Wastrels un peu plus loin. Il y a une question légitime qu’on peut se poser en observant l’univers de We Happy Few : « Est-ce que les downers sont réellement fous? »

Ils frappent la réalité d’un seul coup, sans artifice, et essaient de se souvenir de ce qui est arrivé. Certains se créent un autre monde complet qui provient de l’imaginaire, comme Johny Bolton, Agent Spécial. Ce personnage croit qu’il fait partie d’une société secrète spéciale et qu’on est le nouveau membre. Notre première mission, pour cette société, est d’aller chercher l’agente Peachy, une poupée (comme tous les autres agents à part Bolton et moi).

WeHappyFew-Pinata

À première vue, c’est évident qu’on parle d’une forme de schizophrénie, de folie, car plusieurs personnes se parlent seules, à elles-mêmes, regardent partout et ont tendance à se surprotéger.

Cependant, si on étudie le monde dans lequel ça se passe, ces réactions ne sont pas aussi absurdes qu’elles le paraissent. Notre personnage, lorsqu’il arrête volontairement de prendre de la joy, ne tombe pas immédiatement dans cette folie. J’aurais tendance à croire que c’est le retour à la réalité qui crée une confrontation tellement forte avec la zone de confort initiale, que c’est ce qui crée un choc.

De plus, il n’y a pas d’autre issue pour sortir de leur triste réalité que des « faire à semblant ». Même s’ils ne voudraient plus participer au mode de vie qui a été décidé par la majorité, partout où ils se tournent, malgré ce refus, il n’y a que des éléments de ce monde illusoire de ce mensonge accepté comme vérité.

 

S’enfuir de cette cruelle réalité

Prenons notre univers : nous avons l’impression d’échapper à la réalité par les jeux, la télévision, la littérature, Internet, etc. Dans We Happy Few, il n’y a qu’un seul poste de télé et c’est Uncle Jack, qui rappelle comment il est important de bien se comporter en société et de prendre sa joy. C’est également le seul poste de radio disponible et le seul poste diffusé sur les écrans.  Autrement dit, on n’échappe jamais à la propagande de cette idéologie. C’est comme la publicité dans notre monde à nous; on n’échappe jamais aux tentatives de conformité, de confort et d’achats. Ce qui veut dire qu’il devient très difficile d’échapper à l’apparence, à comment on devrait dépenser et de ce qui donne le bonheur.

https://youtu.be/zh1ZYRJBGYc

Donc, ceux qui prennent de la joy sont également atteints d’un certain niveau de folie : le refus catégorique de voir la réalité telle qu’elle est. Ils vivent dans leur petit monde, sur leur petit nuage, en ignorant complètement les problèmes du monde qui est, je le rappelle, aussi le leur. Comme s’ils étaient à part du peuple. Ceux et celles qui refusent leurs standards de vie sont tout simplement expédiés ailleurs. Quelque chose ne va pas : on se claque une joy. Quelque chose ne va pas : un petit achat. Dans les deux cas, on ne fait qu’ignorer le problème en se concentrant sur quelque chose qui donne un moment de bonheur éphémère, une gratification instantanée, avant de replonger tranquillement dans les problèmes et d’en avoir besoin une autre fois.

 

Tous les chemins mènent à Orwell

Les références d’un univers dont un gouvernement, une force, tire toutes les ficelles, incluant le contrôle des médias, de la technologie et que quelqu’un regarde vos moindres mouvements et contrôle même la rivalité et les ennemis (les rebelles) ne date pas d’hier. C’est rendu trop facile de faire une comparaison entre un univers dystopique et le célèbre 1984 de George Orwell. Cependant, dans ce cas-ci, elle me semble nécessaire. Que ce soit entre la figure de Big Brother d’Orwell ainsi que le personnage d’Uncle Jack de l’univers de compulsion, l’éveil du personnage principal, la distribution de l’information censurée par l’état, les outils de propagande d’idéologie utilisés, on peut voir plusieurs comparaisons avec 1984 (ou Brazil, qui est un film réalisé par Terry Gilliams et raconte, en ajoutant une touche d’humour, une histoire très similaire à celle de 1984).

Les deux apparaissent partout dans leur univers et sont le pilier du peuple, en ce quoi les personnes doivent croire pour garder espoir d’un avenir meilleur. Ils sont la représentation de la paix et de la protection de la nation. Ils protègent leur peuple d’eux-mêmes ainsi que des autres nations externes. Bien évidemment, c’est faux. Ils sont la représentation d’un État totalitaire et ont une définition très restreinte de paix.

 

Big Brother nous surveille tous

purewal-1984-general

Pour ceux et celles qui n’ont pas lu 1984, je vous conseille de passer à la prochaine section, car les prochaines phrases vont contenir des divulgâcheurs. En fait, dans 1984, le célèbre Big Brother n’existe pas. C’est une figure qui a été créée en toutes parts du gouvernement afin de contrôler le peuple et de donner une figure humaine à la nation. La bureaucratie contrôle tout, incluant la vérité.

Uncle Jack est un personnage troublant. Il est une figure paternelle qui semble veiller et conseiller son peuple. Son nom et son rôle rappellent un peu la personnification fictive des États-Unis, Uncle Sam (U.S., les mêmes initiales que « United States »), qui était un emblème voulant donner un sentiment patriotique lors de la Première et de la Deuxième Guerre mondiale. Ce personnage fictif était sur les affiches de recrutement de l’armée (d’où le populaire « I Need You! (for US army) » (littéralement : J’ai besoin de toi dans l’armée des États-Unis)).

 

Réveillons-nous avec l’Oncle Jack

Selon certaines rumeurs, il y aurait même des personnes qui auraient cru qu’Uncle Sam avait réellement existé. Ces personnes sont, jusqu’à preuve du contraire, qu’une légende urbaine. Mon point ici n’est pas de savoir si ces personnes ont existé ou non, mais bien que le pouvoir emblématique d’un personnage fictif peut devenir tellement puissant, qu’on le croit comme étant réel. C’est pour cette raison que j’ai l’impression qu’Uncle Jack n’est qu’une assemblée de symboles, un personnage fictif, en lequel les personnages croient. Il est le symbole de la nation, la personnification du mensonge collectif et des lois que les personnes se sont données entre elles pour vivre dans le bonheur pour toujours.

WeHappyFew-OncleJack

Il est cette fine ligne ambiguë entre la réalité et la fiction. C’est ce qui nous amène au sujet principal du jeu : le mensonge. La seule chose dont nous sommes réellement au courant, c’est qu’il y a eu un incident il y a quelques années et que Wellington Wells est la ville qui n’a pas de passé. Nous n’avons aucune idée de ce qui s’est passé, mais les Wellies, les résidents de Wellington Wells, se sont entendus pour oublier les événements qui sont arrivés et c’est ce déni collectif qui est intéressant.

 

La suite dans un prochain article

Tout comme la dernière fois, nous allons nous en arrêter là pour l’instant! Maintenant que j’ai parlé de l’illusion derrière cet univers, nous traiterons des Wastrels, de la joy et du choix de conformité et de se mentir. Continuons de philosopher sur cet univers intriguant qu’est We Happy Few!

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