Critique – Batman Arkham Knight (PC / PS4 / XOne)

Il existe plusieurs manières de créer un bon jeu vidéo que l’on peut synthétiser en deux courants principaux : innover et apporter du neuf à un genre existant (voire même inventer un genre), ou bien respecter une recette prédéterminée à la perfection pour donner naissance à un classique parmi les classiques. À quelle catégorie Batman Arkham Knight aspire-t-il ? Sans aucun doute à la seconde mais, comme nous allons le voir, tout ne coule pas forcément de source même quand on reprend une recette déjà suivie à maintes reprises. Explications.

Fiche Technique

  • Développeur: Rocksteady
  • Editeur: Warner Bros
  • Plateformes: PC, PS4, Xbox One
  • Nombre de joueurs: 1
  • Type de jeu: action/aventure en monde ouvert
  • Prix de base: 59.99$
  • Expansions: Oui

Prérequis pour PC (minimum) :

  • OS: Win 7 SP1 ou Win 8.1 (64-bit obligatoire)
  • Processeur: Intel Core i5-750, 2.67 GHz | AMD Phenom II X4 965, 3.4 GHz
  • Mémoire vive : 6 Go RAM
  • Carte graphique : NVIDIA GeForce GTX 660 ou équivalent AMD non précisé
  • Mémoire graphique : 2 Go
  • DirectX®: 11
  • Espace de stockage : 45 Go

 

Une recette qui marche

Vingt-deux adversaires: easy task for the Batman
Vingt-deux adversaires: easy task for the Batman

D’abord, rappelons justement quel genre de recette a fait jusqu’ici le succès de la série Batman Arkham, qui en est désormais à son quatrième opus. Vous contrôlez évidemment le Chevalier Noir, dans de larges environnements ouverts dans lesquels vous pouvez planer librement (depuis Arkham City). Il y pullule des activités annexes et vous disposez, en plus d’aptitudes martiales qui vous permettent de donner une raclée à une vingtaine d’individus simultanément, d’une panoplie de gadgets variés qui vont du traditionnel Batarang au dispositif de piratage, en passant par le gel explosif ou le fusil électrique. Ces gadgets, qui peuvent également être utilisés au cœur de la mêlée, vous serviront à activer différents mécanismes qui formeront le cœur de l’exploration et de la résolution des énigmes disséminées dans les niveaux dits « fermés » ainsi que dans la ville qui vous est offerte comme terrain de jeu, qu’il s’agisse d’Arkham (dans City et Origins) ou de Gotham (dans Arkham Knight).

Comme à l’habitude, et ce depuis Arkham Asylum, des phases d’enquête ponctuent également la progression pour rendre hommage au statut de plus grand détective que porte fièrement Batman, mettant ainsi à profit un scanner ultra performant vous permettant de reconstituer des scènes de crime en analysant des indices en temps réel. Enfin, tout aussi traditionnellement, vous êtes confronté à des boss, super-vilains emblématiques de l’univers de la chauve-souris, au cours d’affrontements souvent mémorables.

 

Des choix discutables

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Mais, et c’est là le premier point où Arkham Knight diffère de ses prédécesseurs de la pire des façons, vous n’aurez pas droit à ces fameux combats de boss dans cet opus. Le Pingouin, Poison Ivy, Double-Face et consorts sont bel et bien de la partie, mais la majorité n’est finalement là que pour servir de prétexte à des missions annexes assez peu intéressantes et répétitives. Exit, donc, les combats dantesques d’Arkham City où notre Batou devait se frotter à Solomon Grundy lui-même ou encore à Mr. Freeze, et place… à la Batmobile ! Car, c’est bien connu, lorsque l’on retire un ingrédient d’une recette, il est convenu de le remplacer par un autre pour palier au manque d’arôme ou d’assaisonnement qu’une telle manœuvre peut entraîner. Hélas – et ce même si la conduite de la voiture emblématique de Batman se révèle fluide, agréable, offrant un nouveau moyen de se déplacer rapidement en extérieur et permettant au jeu de développer quelques idées de gameplay intéressantes, avec le treuil notamment – on ne peut que déplorer que ce qui se rapproche le plus d’un boss dans le jeu soit en réalité une bête phase de cache-cache souterrain, en Batmobile donc.

L’intégration de ce véhicule sur-armé, avec lequel vous pourrez lutter à armes égales avec les nombreux blindés ennemis que vous croiserez sur la carte, est certainement ce qui a pu demander le plus d’efforts à l’équipe de développement : en témoignent le focus marketing placé sur ledit véhicule avant la sortie du jeu, ainsi que la façon presque poussive avec laquelle certaines énigmes sont conçues, vous forçant par exemple à hisser la Batmobile sur les toits de façon un poil abracadabrantesque pour pouvoir utiliser le treuil électrique et ainsi… charger un générateur. Le fusil à impulsion électrique n’aurait-il pas pu faire l’affaire ? Nous avons fait suivre la question à WayneTech, mais attendons encore la réponse.

 

Un Chevalier nommé désir

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Côté scénario, on est en terrain plus ou moins connu : Scarecrow a développé un gaz de peur pouvant se propager à vitesse grand V et il vous appartient de contrecarrer ses plans, notamment avec l’aide de Jim et Barbara Gordon. Là où on sort des sentiers battus, c’est avec le personnage du Chevalier d’Arkham, qui donne son nom au jeu. Allié de l’Épouvantail, à la tête d’une armée de mercenaires suréquipés et bien entraînés, l’Arkham Knight connaît bien Batou et ses procédés, ce que vous aurez l’occasion de constater tout au long de l’aventure qui s’étale sur une bonne vingtaine d’heures de jeu en ligne droite. Et si la tension planant autour de l’identité de ce super-vilain totalement inédit créé en collaboration avec DC Comics demeure un temps, elle retombe malheureusement trop vite sitôt que le jeu se décide à vous donner un premier indice, aussi discret et grossier qu’une vache au milieu de l’autoroute. En résumé, impossible de passer à côté donc.

Le reste de la narration suit autrement un fil convenu fait d’allers-retours, rendus plus attrayants par la « présence » du Joker (nous tairons ici le pourquoi du comment afin d’éviter de spoiler davantage), de combats en arène (qu’il s’agisse d’affrontements directs ou de séries d’éliminations furtives) et d’enquêtes, qui se font bien trop discrètes à mon goût sitôt passé le tiers de l’aventure. Une fois celle-ci terminée, et à supposer que vous ayez suivi la trame principale en ligne droite, vous ne manquerez pas pour autant de choses à faire, surtout si vous désirez obtenir la fin complète, qui nécessite de finir le jeu à 100%.

 

Gros contenu, grosse déconvenue

Pour en arriver là, il faudra donc passer par un nettoyage complet et de fond en comble de la ville de Gotham, minée, surveillée et placée sous le contrôle absolu des mercenaires du Chevalier d’Arkham, ainsi que mettre sous les verrous tous les super-vilains présents dans le jeu. Cela inclut bien sûr ce cher Édouard Nigma qui, une fois n’est pas coutume, a disséminé quelques 300 trophées à collecter à travers la ville, en plus de vous proposer une trentaine d’énigmes tout aussi éparpillées et rendues parfois assez complexes par une traduction française assez approximative (les bougres ont tenu à conserver les rimes, ce qui rend tout de suite la traduction plus compliquée). Autant dire que Batou a du pain sur la planche s’il veut pouvoir écrouer E.Nigma. Mais, si en soit la longue quête de ces trophées représentera un défi sain, mettant à profit vos neurones et votre patience, il reste regrettable que le jeu ait été conçu, sur ce point en particulier, comme un Metroïdvania-like. On ne compte plus en effet le nombre de fois où, en explorant la carte ou les recoins d’un niveau fermé, on tombera sur un mécanisme impossible à activer pour le moment faute de posséder le gadget adéquat. Un gadget, et c’est là que le procédé devient risible, que Batman sortira de sa poche quelques temps plus tard lorsqu’il en aura besoin pour progresser dans l’aventure ou, tout aussi stupide, que l’on trouvera négligemment posé sur une table à la toute fin du jeu, une table déjà croisée auparavant à maintes reprises, et ce sans aucune explication ou lien logique (I’m looking at you, Coup de givre).

 

Conclusion à contre-pied

Gotham, me voilà !
Gotham, me voilà !

Et malgré tout ça, Batman Arkham Knight reste un bon jeu. Pourquoi ? Simplement car il reprend une recette à succès, qui a déjà fait ses preuves : même en apportant des modifications malvenues à la recette en question, le titre en conserve toutes les bases, saines, et en fait bon usage. Le titre est graphiquement un beau représentant de ce qui peut se faire sur les dernières consoles de salon, offre un large monde ouvert fourmillant de détails où incarner le Batman n’aura jamais été aussi plaisant et offre des sensations de jeu très satisfaisantes. La Batmobile, même si son intégration a été malmenée plus haut, reste un élément de gameplay supplémentaire qui offre son lot de possibilités au joueur, et on ne reste finalement très amer que face à la disparition des boss qui avaient fait une partie du sel des opus précédents. En définitive, BAK n’est donc pas le meilleur Batman Arkham qui soit mais demeure un bon jeu vidéo par nature, même si on a un peu l’impression de faire du sur-place (qui a parlé du syndrome Assassin’s Creed ?).

 

Un mot sur la version PC

A l’heure où ces lignes sont publiées, la version PC du titre a été retirée de la vente sur Steam, la faute à d’innombrables retours négatifs qui pointent du doigt des options graphiques amputées du jeu (et pourtant présentes sur les consoles de salon, un comble), un framerate bloqué de base à 30 IPS et surtout une instabilité générale du titre qui le rend difficile à faire tourner dans de bonnes conditions, même sur des machines équipées d’une carte graphique de dernière génération (type R9 290 ou GTX 980). Le tollé généré par cette débandade a depuis suscité quelques réactions, chez des sources proches de Warner Bros notamment (qui édite le jeu), et il apparaîtrait que tous ces déboires techniques étaient déjà présents dans une version du titre datant de plusieurs mois avant la sortie (qui avait été repoussée). Rocksteady, le studio de développement, a donc du voler à la rescousse du studio plus modeste qui avait initialement la charge du portage de la version PC afin de partir à la chasse au bogue et de stabiliser l’ensemble du jeu. Retour prévu d’Arkham Knight dans les rayons de Steam : pas avant septembre ou octobre prochain…

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