Critique – Ragnarok : Fate of the Norns

J’aime bien les Vikings. Je sais, ça devient un peu générique. Au fond, tout le monde aime bien les Vikings de nos jours… Terreurs des mers, sagas épiques, il y a de quoi faire rêver! Forcément, partant de ce présupposé simple, lorsque j’ai vu, il y a un an, une partie démo d’un jeu au nom sentant bon la glace froide et les haches affûtées, j’ai sauté sur l’occasion.

Savez-vous ce qui est mieux que de jouer à un bon jeu de rôles? Y jouer avec son créateur. C’est donc un peu par hasard que j’ai découvert Fate of the Norns et Andrew Valkauskas, son créateur. On m’a décrit rapidement l’univers en m’expliquant qu’à l’origine il s’agit d’une variante de D&D vieille de 20 ans, et récemment revue, corrigée et rééditée. Je dois avouer que la partie D&D m’a fait un peu peur, parce que je n’aime pas Donjons & Dragons, mais c’est une longue histoire, trop longue pour cet article.

FICHE TECHNIQUE

  • Type de produit : Jeu de rôles
  • Sous-genre : aventure barbue / pillage bien arrosé / survie post-apocalyptique
  • Date de publication : 1993 (1re édition), 2012 (2e édition)
  • Auteur : Andrew Valkauskas
  • Prix approximatif : 50 à 85 $
  • Disponible en français : oui
  • Extensions : oui

 

SYSTÈME DE JEU

Fate of the norns_2_SystemeVous vous rappelez qu’avant la fiche technique et la jolie image je disais ne pas aimer D&D? Une des raisons pour laquelle je n’ai aucun problème avec Ragnarok : Fate of the Norns, c’est parce qu’il n’y a pas de D20. En fait, il n’y a pas de dés du tout. C’est même très exactement là que résident la plus grosse force et, du même coup, la plus grosse faiblesse du jeu à mon sens!

Dans l’esprit du jeu et parce que c’est vachement rigolo, Ragnarok : Fate of the Norns se joue intégralement avec des runes. Vikings, destin du personnage, divination, runes, vous saisissez?

Les personnages joueurs ont deux statistiques : essence et destinée qui dépendent de son niveau. L’essence détermine le nombre de runes qu’il a dans son petit sac et la destinée, le nombre qu’on en tire pour les tests ou les combats. Les tests sont assez simples, il y a trois caractéristique : physique, spirituel et mental, chacune ayant une couleur. Quand on fait un test physique pour soulever un gros caillou et le lancer, on « wyrd » (c’est-à-dire qu’on prend ses runes au hasard dans son sac) et on compte le nombre de runes physiques.

En combat, chaque rune représente une action et le joueur en tire, encore une fois, autant que sa destinée le prescrit chaque tour. Il peut s’agir d’une action cinématographique : courir, sauter, coller une baffe à quelqu’un ou pisser contre une maison; mais aussi d’une action spéciale liée à la rune. Le principe qui en résulte est moins aléatoire. Les actions n’échouent pas. On peut se défendre, ce qui réduira ou fera échouer une action, mais il n’y a aucune chance qu’une action échoue. Malgré ça, tout est très bien calibré (puisque c’est aussi vrai pour les ennemis). La gestion des blessures se fait aussi avec les runes puisqu’il suffit de retirer des runes du sac quand le joueur subit des blessures.

Je vous passe les histoires de runes à utiliser pour améliorer une action spéciale et compagnie. Si vous aimez l’optimisation, rassurez-vous, la profondeur tactique est au rendez-vous.

Le gros défaut du système, c’est qu’il faut les avoir, les runes. Il faut même y ajouter la fiche avec toutes les indications pour gérer ses blessures et statuts. Il faut même avoir un ensemble complet par joueur (au cas où l’on fasse une campagne) et plusieurs pour le maître de jeu. On peut les fabriquer ou les acheter, mais il s’agit quand même d’un investissement initial considérable. Pour réduire les coûts, il existe une application pour gérer tout ça, mais il faut avoir envie de jouer toute la partie avec son téléphone à la main (et ne pas avoir de trop gros doigts).

 

CRÉATION DE PERSONNAGES

fateofthenorns-creationLa création de personnages suit un modèle simple. Comme je l’expliquais plus tôt, le niveau se partage entre l’essence et la destinée. Donc, quand on crée un personnage, on choisit sa classe et son niveau, puis on divise entre les deux statistiquess un niveau par point d’essence et deux pour un point de destinée.

Et là, ça se complique. Parce qu’on se retrouve tout à coup devant trois tableaux : un pour les actions spéciales, un pour les passifs et un autre pour les compétences. Et il faut disposer autant de runes qu’on a d’essence là-dessus. Ce qui, quand on connaît le jeu, ne prend pas trop longtemps, mais est diablement long quand on ne le connaît pas!

Je ne vais pas trop m’étaler sur les statistiquess, je l’ai fait plus haut. Il existe néanmoins un autre système assez emblématique pour qu’il soit mentionné : la mort.

Dans la majorité des jeux, mourir, ça veut simplement dire créer un nouveau personnage. Mais dans Ragnarok : Fate of the Norns, quand quelqu’un meurt, on s’assoit autour du feu en chantant ses sagas et en espérant qu’il atteigne le Valhalla (ou d’autres endroits chouettes du genre). Donc, quand le personnage d’un joueur meurt, les autres joueurs racontent ses hauts faits. Pour chaque haut fait raconté (et certaines autres conditions de jeu), le joueur tire une rune. À la fin, le maître de jeu pige une rune de son propre sac : si elle est identique à une rune tirée par le joueur, il gagne un niveau de joueur. Ces petites bêtes permettent à de futurs personnages de se multiclasser ou même, à plus haut niveau, de devenir des Einherjar (les guerriers amenés au Valhalla et revenus) ou des fils of Müspel si l’âme est allée vers Müspelheim.

C’est une mécanique tout à fait sympathique qui pousse les joueurs à faire un peu attention à ce que les autres font. Elle rend néanmoins l’accès à ces niveaux très difficile.

 

UNIVERS

FateOfTheNorns_Midgard

Bon, au-delà des Vikings mythologico-historiques, il convient de placer un peu mieux l’univers. On incarne un groupe de Vikings qui vivent à Midgard. Les deux premiers bouquins sont faits pour jouer dans une situation apocalyptique, ce qui n’est pas le cas du suivant. Le Ragnarok est là, le monde est plongé dans le Fimbulvetr, l’hiver sans astres. Le soleil et la lune ont été dévorés par un fils de Fenrir et les étoiles sont disparues. Le monde devient incroyablement froid et sombre, les récoltes dépérissent et c’est le bordel un peu partout. Bref, un univers idéal pour vivre de belles aventures épiques!

Le monde est aussi livré à la merci des autres royaumes d’Yggdrasil, et les Einherjar, comme les fils de Müspel et d’autres joyeusetés, se promènent sur Midgard avec leurs objectifs bien à eux. Il ne faut pas longtemps à l’humanité pour comprendre qu’il n’y a pas de gentils ou de méchants dans l’histoire, juste ceux qui évitent de se battre dans leur village et ceux qui le détruisent.

L’univers est extrêmement proche des sagas poétiques vikings, et l’auteur se plonge dans celles-ci depuis plus de 20 ans. Autant dire que discuter avec lui (si vous avez l’occasion de le croiser) est un plaisir incroyable!

 

QUALITÉ ARTISTIQUE

Fate of the norns_5_ArtJ’ai un amour très fort pour les illustrations et la mise en pages des livres pour une raison très simple : en plus d’être beaux, tous les dessins et éléments graphiques respectent l’esthétique viking. Tout sent parfaitement l’ambiance viking que ce soit dans les lignes ou les couleurs. Et ça, c’est vraiment fort et ça apporte au livre ce petit quelque chose en plus.

L’autre point important, c’est que, même dans l’écriture du livre, dans le style, une grosse partie de ce qui concerne l’univers est racontée comme une histoire, comme une saga, et non comme un inventaire de tous les trucs à connaître. Ce qui fait que le bouquin est intéressant à lire, même sans avoir spécialement envie de maîtriser le jeu.

 

EXTENSIONS

Il existe actuellement une extension au livre de base, et une deuxième pointera bientôt le bout du nez. La première comprend des classes supplémentaires, des pans d’univers entiers en plus afin de couvrir tout ce qui est digne d’intérêt. La prochaine verra l’ajout de plusieurs mythologies proches, mais alternatives comme des légendes islandaises ou finlandaises par exemple.

Les nouvelles classes impliquent, bien sûr, un bazar de nouvelles compétences, de nouveaux pouvoirs et objets magiques. Clairement, elles valent la peine pour avoir une meilleure compréhension du monde. Il reste quelques jours sur la campagne Kickstarter du prochain livre : Lord of the Ash. Pour avoir eu la chance de tester les nouveautés, je peux vous dire qu’elles sont très intéressantes, mais plutôt réservées à des joueurs expérimentés. Préférés donc les autres livres pour commencer.

 

CONCLUSION

C’est un vrai coup de cœur que j’ai eu il y a un an pour ce jeu. Mais un coup de cœur un peu bizarre : celui du joueur. Je n’avais pas spécialement envie de le maîtriser, mais j’avais envie de continuer à y jouer. Quand j’ai pu joindre une campagne, il y a quelques mois, j’ai fait des modifications dans mon agenda pour assurer mon siège et je ne le regrette pas un instant. Vraiment, Ragnarok : Fate of the Norns est un jeu que j’aime énormément. Son principal défaut, c’est vraiment l’investissement de base que représente les livres et les runes. L’absence de fiche de personnage efficace est un peu frustrant aussi.

Si vous cherchiez un exemple de succès Kickstarter, Ragnarok : Fate of the Norns en fait partie et c’est un cas qui mérite qu’on s’y intéresse.

On aime

  • Le système de jeu à base de runes;
  • La gestion de la mort et des contes épiques;
  • La profondeur tactique surprenante derrière un système aux abords très simples;
  • Les illustrations;
  • Le travail immense effectué sur l’univers et l’écriture des livres.

On n’aime moins

  • La feuille de personnage officielle, Excel, Powerpoint, ou un carnet sera votre meilleur ami;
  • L’investissement de base pour acquérir les runes et les tapis;
  • La durée des combats qui peuvent facilement s’éterniser;
  • La difficulté à obtenir des niveaux de joueur après la mort d’un personnage.

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Source :  Site officiel de Ragnarok : Fate of the Norns

2 thoughts on “Critique – Ragnarok : Fate of the Norns

  1. Ça a l’air intéressant! Est-ce qu’il y a des quêtes pré-écrite comme pour Pathfinder? Si non, j’comprends pourquoi tu as attribué une note de cinq à la facilité d’animation… Ça doit être dur d’apprendre tout ce qu’il y a à savoir sur un tel univers!

  2. Hmm la notification est passé dans mes spams… (bref j’avais pas vu ton commentaire).

    Il y a des scénarios pré-écrits. J’ai surtout mis 5 parce que la création de méchants peut être assez longue et fastidieuse tant que tu n’es pas habitué, que le système de magie peut rapidement devenir une partie de bejeweled et que le système de rune rend la gestion de plusieurs personnage assez gourmande en place et en concentration.

    Au-delà de ça le lore est vraiment bien foutu, et il y a pas mal de ressources donc ça permet d’avoir plein d’inspirations pour des scénars sympa :D

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