Critique – Assassin’s Creed Syndicate

Ceux qui me connaissent bien savent que j’ai rapidement perdu la touche avec la série Assassin’s Creed et que j’ai été rapide à lui attribuer l’étiquette de « vache à lait ». Après la tournure particulière et le contenu plutôt mou d’Assassin’s Creed III, j’ai porté mon attention ailleurs. L’année 2015 introduisait donc le dernier titre avec quelques nouveautés, dont un personnage féminin. Après quelques mois d’hésitation et de manque de temps, je me suis lancé.

Fiche technique

  • Type de produit : aventure/action, monde ouvert
  • Éditeur : Ubisoft
  • Durée du jeu : une trentaine d’heures
  • Nombre de joueurs : un joueur
  • Âge recommandé : Mature
  • Langue du produit : français/anglais/italien/espagnol/allemand
  • Disponible en français : au complet (audio, sous-titres)
  • Prix moyen : ~ 60$ sur PC, ~40$ sur console
  • Contenu téléchargeable : Une passe de saison, des outfit packs et des missions supplémentaires
  • Consoles : Steam, PS4, XBoxOne
  • Site officiel du studio : http://assassinscreed.ubi.com/fr-ca/games/assassins-creed-syndicate/

 

Ligne du temps

La série Assassin’s Creed est reconnue pour la richesse historique derrière chaque époque explorée. Entre la renaissance en Italie et la Révolution française, en passant par les pirates dans les Caraïbes, les avides d’histoire ont su explorer la ligne du temps sous diverses couleurs. Bien que le tout demeure une oeuvre de fiction, l’attention aux détails et la fidélité historique dans son ensemble est une qualité que je ne retirerai jamais des jeux. Quant aux mécaniques de jouabilité… C’est malheureusement le maillon faible. Pouvoir grimper sur les murs et escalader des monuments, c’était innovateur en 2007 lors du premier jeu. C’était encore excellent avec sa suite en 2009, surtout avec la qualité de l’histoire. Sept ans plus tard, à coup d’un jeu par an, la saveur est maintenant amère. Ubisoft a tenté de plusieurs façons d’innover et de revigorer la franchise et ils ont quand même eu de bonnes idées dans son ensemble, mais beaucoup de joueurs (moi inclus) ont déjà perdu intérêt il y a bien longtemps, sans compter que tous les personnages étaient du pareil au même : grand, costaud, sérieux, cheveux bruns. Trop de pareil au même, assez pour me saturer.

Alors, qu’est-ce qui m’a attiré vers Syndicate exactement? Tel que mentionné plus haut, Ubisoft a voulu répondre (ou peut-être était-ce prévu depuis longtemps) aux différentes critiques sur l’absence de personnages féminins jouables et pour la première fois dans l’entièreté de la franchise, nous obtenons un jeu avec deux personnages jouables accessibles en tout temps. Du peu que j’ai vu entre les vidéos, il y avait quelque chose, une petite touche qui a su m’intriguer, assez pour m’inciter à me procurer le jeu.

 

1868

Commençons par le commencement. Le joueur est transporté à Londres à l’époque victorienne en 1868. C’est la Révolution industrielle, il y a des cheminées et de la fumée partout, les eaux sont envahies de bateaux à vapeur et la ville est segmentée de chemins de fers… Il pleut. Beaucoup. On s’y croirait! Une telle époque permet aussi de rencontrer quelques figures historiques, dont Charles Darwin et Alexander Graham Bell. La ville est d’ailleurs immense. Tout comme les précédents jeux, le monde est riche, rempli de secrets et de choses à collectionner. Je ne vais donc pas trop m’attarder sur l’univers en soi et plutôt m’intéresser aux mécaniques du jeu.

À l’inverse des précédents opus, Ubisoft ne nous offre pas la vie des protagonistes que nous incarnons. Nous sommes plutôt projetés dans leur vie d’adulte où ils sont déjà un minimum entraînés. Les premières minutes du jeu nous amènent donc à connaître le tempérament de Evie et Jacob Frye, des jumeaux successeurs de leur feu père qui était un maître assassin. Tout comme les générations précédentes de la fraternité des assassins, ils sont à la chasse aux templiers. Bien que leur mentor les considère encore comme trop jeune pour affronter la grande ville et la retirer des mains des templiers, les jumeaux Frye, téméraires et jeunes, en font à leur tête et s’aventurent eux-même dans la gueule du loup. Donc, en quelques minutes de jeu, les joueurs peuvent déjà explorer l’entièreté de la ville et commencer à débloquer du contenu, découvrir des secrets et tuer des malfrats. Donc déjà, c’est rafraîchissant de se faire offrir autant de liberté si tôt dans le jeu.

 

Duo d’enfer

Certains journalistes ont déjà critiqué le manque de profondeur des personnages. Evie est la plus mature et la plus discrète, elle est du genre réfléchi et ses compétences (qu’on débloque avec des points accumulés au cours du jeu) sont plus orientés vers la discrétion et l’infiltration. Jacob, quant à lui, est plutôt direct, batailleur et combattant. Il aime le chaos et il ne se gêne pas pour en créer. Evie s’intéresse aux pièces d’Eden (des artéfacts surpuissants provenant d’une civilisation précédant l’homme) tandis que Jacob est concentré sur l’élimination des templiers. Les deux ont un but commun; éliminer les templiers, mais leurs méthodes diffèrent et peuvent amener des frictions. En parallèle, les templiers sont comme d’habitude représentés comme de gros méchants qui veulent dominer Londres. Vous l’aurez deviné, c’est assez noir et blanc et je comprends l’approche des journalistes d’avoir critiqué le manque de profondeur. Est-ce que c’est un mal en soi? J’en doute.

Après s’être fait offert des histoires lourdes, lentes et surchargées (c.f. Assassin’s Creed III) ou prévisibles (Assassin’s Creed Unity), des histoires très sérieuses qui tournent autour de la vie passée du protagoniste, la légèreté et l’humour entourant le duo Frye est rafraîchissant. Il y avait quelque chose de simplement plaisant de les voir interagir, tantôt se disputer et tantôt être inséparable. Le concept de frère et sœur n’est pas beaucoup utilisé dans les jeux et avoir les deux jouables en plus d’être jumeaux amène une touche d’originalité au jeu. Le joueur peut passer d’un personnage à l’autre en un bouton depuis le menu. Quant aux missions, certaines sont réservées à Evie (40% du jeu) et le reste à Jacob. Les missions secondaires peuvent être complétées par les deux.

Donc, oui, l’histoire n’est pas riche, elle n’est pas profonde. En revanche, est-elle plaisante? Oui et j’ai eu un des combats de boss de fin les plus frissonnants que j’ai vécu dernièrement.

 

Steampunk

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Evie, sur le toit d’un train, admirant la Tamise

Qui dit révolution industrielle dit steampunk, un terme utilisé pour illustrer un côté mécanique, vapeur, à l’univers. Comme je l’ai mentionné, après une dizaine de jeux, escalader un bâtiment n’est plus tant plaisant. Ubisoft a donc palier au problème et nous a offert un raccourci : un grappin. Lorsqu’on l’a obtenu, un seul bouton est nécessaire pour grimper un mur en une seconde ou traverser une large rue sans toucher le sol. C’est rapide, simple et efficace en plus de permettre la traversée d’environnement avec plus d’aisance qu’avant. Sinon, il y a aussi la possibilité de voler une calèche et de foncer à toute vitesse dans les rues de Londres. À la manière d’un GTA-Like, nous pouvons littéralement voler des voitures, rouler sur les citoyens, renverser des lampadaires et foncer dans les autres embarcations. Cela offre donc à quelques moments dans le jeu des poursuites intenses, des courses et il est même possible de sauter d’un véhicule à l’autre et de se battre sur le toit en plein déplacement.

Sinon, il y a aussi l’option d’utiliser les trains, ce qui amène aussi quelques moments intenses de combats sur un train à toute vitesse. Parlant des combats, Ubisoft a simplifié les mécaniques et a accéléré les séquences. Nous avons donc un bouton pour briser la défense, un pour éviter les coups, un pour attaquer et finalement un pour les attaques à distance. Nous nous rapprochons plus en fait d’un beat’em all où le jeu calcule les combos et offre de l’expérience et des coups critiques. Les combats sont donc très fluides, rapides et efficaces. Plus le joueur monte de niveau, plus les combats seront faciles, car il débloquera aussi des armes plus puissantes et ainsi de suite (j’aborde la chose en détails plus bas).

Si je résume : se déplacer est plus rapide, se battre est plus plaisant visuellement et mécaniquement, l’univers est réussi et les personnages sont charismatiques et attachants. Alors, qu’est-ce que je pourrais reprocher au jeu? Bien des choses.

 

L’envers de la médaille

Je vais aller droit au but : j’ai une haine profonde envers la façon qu’Ubisoft gère les sauvegardes et avec les standards de jeux vidéo de nos jours où on nous offre un système de compétences pour donner l’illusion de liberté, mais que fondamentalement nous n’en avons pas tant.

Pour commencer, la gestion des sauvegardes. À l’époque d’Assassin’s Creed II, les sauvegardes du jeu étaient sur notre PC et nous pouvions avoir jusqu’à trois cases de sauvegarde (à la manière de Zelda où tu choisis une case au début de ta partie et elle te serre pour le reste du jeu). Depuis je ne sais plus quel opus, les sauvegardes sont donc bien scellées dans les serveurs d’Ubisoft. Si tu fais une gaffe ou une action que tu ne veux pas dans ton jeu, grâce à la sauvegarde automatique et à l’impossibilité de revenir en arrière, tu es foutu. Syndicate n’offre d’ailleurs qu’une seule sauvegarde pour tout le monde. Si le joueur veut recommencer une partie neuve, il doit tout recommencer au complet. Je trouve ça complètement idiot.

Deuxièmement, j’ai mentionné les compétences plus tôt. Ça part d’une bonne idée et d’une bonne volonté, mais comme dans beaucoup de jeux, c’est mal géré. J’aime avoir l’option de personnaliser mon personnage. Ce que je n’aime pas, par contre, c’est l’aspect permanent derrière. Si tu achètes une compétence accidentellement, elle est là pour toujours. Ces compétences rendent non seulement le jeu plus facile (donc j’aurais aimé l’option de pouvoir les activer/désactiver à volonté), mais en plus, elles sont obligatoires pour pouvoir porter de nouvelles armes. À chaque niveau, le joueur doit acheter X compétences pour aller au niveau suivant, ce qui veut dire que, pour porter les objets ultimes du jeu (incluant des capes et armures), il faut dépenser dans tous les points. Pour Jacob, ce n’est pas trop un problème, par contre Evie a une compétence en particulièr que j’ai essayé d’éviter comme la peste pour finalement juste rester au niveau 9 (l’avant-dernier niveau). Je fais référence à la compétence « caméléon » où, lorsque le joueur se met en mode discret et qu’il s’immobilise, il devient invisible, littéralement. Même s’il fait  jour, même si je suis devant des citoyens, pouf! Soudainement invisible comme si je venais d’activer une machine high-tech ou une cape d’invisibilité. C’est visuellement laid, dérangeant et déconcentrant en plus de ne pas cadrer avec l’univers. Ubisoft a bien tenté d’expliquer l’idée derrière, « qu’en tant que maître assassin, Evie parvient à se camoufler et à ne faire qu’un avec l’environnement », mais je trouve ça boiteux et il y aurait eu plein d’autres façons de le montrer. Du coup, vu que je ne peux pas désactiver mes compétences et que si je l’achète, je l’ai pour toujours, j’ai dû m’arrêter au niveau 9 et accepter que je ne puisse jamais utiliser toutes les armes du jeu. Simplement offrir la possibilité de désactiver les compétences m’aurait évité ce casse-tête. Tomb Raider et Rise of the Tomb Raider souffrent aussi de ce concept de compétences permanentes qui ne peuvent être désactivées, c’est donc une norme de nos jours étrangement.

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En dehors de ça, le jeu a bien tenté de distinguer les jumeaux (Evie plus discrète, Jacob plus batailleur), mais c’est très subtil. Outre quelques compétences au niveau 10 qui sont propres à chacun, ils ont accès aux mêmes techniques, aux mêmes armes, aux mêmes mécaniques. Donc être l’un ou l’autre n’amène pas beaucoup de variation en soi, ce qui n’est pas nécessairement une mauvaise chose puisque cela aurait incité le joueur à prendre parti entre Evie ou Jacob plutôt que de jouer le personnage qui lui convient et c’est bien, puisque Londres est quand même saturé en contenu par les templiers.

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Parlant de ces derniers, la ville de Londres est divisée en sections et chaque section est sous-divisée en quartiers, chacun contrôlé par les templiers. Afin de libérer un quartier, il faut compléter la quête secondaire qui est attachée à elle. Cela peut aller d’assassiner un templier à libérer une usine d’exploitation d’enfants sans se faire remarquer ou bien kidnapper un individu et le rapporter à un point X. Le dernier type s’est avéré être pénible. Préférablement, il faut se pointer derrière la victime sans se faire voir, activer le mode « otage », marcher avec elle jusqu’à une calèche et conduire à une destination… Je me suis forcé les premières fois… Mais, à force de recommencer, car ma cible s’enfuyait ou parce que j’étais ralenti par une armée de templiers, j’ai simplement fini par assassiner ma proie et ramener son cadavre à destination. Moins d’expérience et moins de récompense, mais même résultat. Dans l’ensemble, le tout s’est avéré quand même un minimum répétitif, surtout avec la quantité de ce type de missions à compléter.

Mon dernier point est donc le système de crafting. Certaines armes ou armures demandent d’être fabriquées et, pour ce faire, il faut trouver les ingrédients (cuir, métal, bois, etc.). Il faut une certaine quantité. Nous en obtenons lors de certaines missions, mais, pour le reste, il faut fouiller les coffres cachés un peu partout dans la ville… Et c’est tout. Donc en gros, si le joueur veut une belle arme X ou une belle armure Y, il doit parcourir la ville, ouvrir des coffres ici et là et espérer que leur contenu donne suffisamment pour pouvoir fabriquer l’objet désiré. C’est un peu redondant et aléatoire comme façon de fournir les ressources et bien qu’à chaque niveau il existait d’autres versions du même objet au cas où le joueur ne veut pas trop se forcer, il n’en demeure pas moins que c’est un peu anti-climatique d’atteindre finalement un niveau X seulement pour être bloqué, car il nous manque 30 planches de bois que nous devons trouver on ne sait où. Il n’est pas possible pour nous de déterminer à l’avance le contenu des coffres.

 

En bref…

Mon dernier passage pourrait laisser croire que finalement, mon expérience n’a pas été si plaisante, mais c’est plutôt l’inverse. Les problèmes liées aux compétences et aux sauvegardes ne m’ont pas empêché d’apprécier l’ensemble du jeu et pour être franc, les bons points détrônent facilement les mauvais. J’ai été accroché du début à la fin à l’histoire, aux personnages et au contenu du jeu. La dernière fois que j’ai eu autant de plaisir dans un Assassin’s Creed, c’était avec le 2e opus (qui est considéré comme le meilleur de la franchise). Il ne l’a heureusement pas détrôné, mais il était très près. La présence d’un personnage féminin ajoute aussi une touche de couleur qui manquait.

Je le recommande sans hésiter, ne serait-ce que pour la légèreté du jeu et pour l’absence de « prise de tête ». Syndicate est simple et efficace et ça fait son charme.

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