Depuis les dernières années, l’Amérique du Nord connaît une montée fulgurante de la pratique de la sorcellerie et ce parmi les Milléniaux. Que l’on croit ou non au mysticisme, il est intéressant de voir cette réappropriation de cette figure longtemps (et jusqu’ici) considérée féminisme. Il faut se rappeler que cette génération a été bercé par Harry Potter, Hocus Pocus, Pratical Magic, Sabrina the Teenage Witch, Buffy the Vampire Slayer, Charmed, pour ne nommer que ces produits culturels. Bref, les sorcières font partie de la culture populaire depuis belles lurettes!
Quoique le sujet de l’empowerment des femmes à travers la sorcellerie a été exploité maintes et maintes fois, l’engouement persiste. Se pourrait-il que les femmes aient encore l’impression que leur épanouissement soit menacé ? Que l’image que l’on dépeint d’elles n’est toujours pas juste et inclusive ? Et si c’est le cas, en quoi est-ce que les nouveaux produits culturels ajoutent de la valeur à leurs histoires (ou celles des sorcières) ?
Outlander
Série télé et série de livres, Oultander nous fait découvrir les aventures de Claire Elizabeth Beauchamp, voyageuse temporelle qui atterrit en Écosse à la fin du 18ème siècle. Infirmière de profession, Claire utilise ses connaissances médicales pour survivre à sa nouvelle réalité. Étonnamment, les talents de Claire sont autant aimé que détesté. Plusieurs voient en elle une guérisseuse indispensable et d’autres comme un danger.
La série dépeint avec habileté qu’autrefois les femmes savantes, ou celles curieuses de la biologie humaine et de l’herboristerie, étaient vues comme des menaces. Des menaces pour l’avancement de la médecine et du maintien du pouvoir de l’Église. Heureusement, Claire ne reste jamais au bout de ses peines et démontre que ses connaissances lui permettent d’aider autrui et d’atteindre ses objectifs.
Chilling Adventures of Sabrina
À ne pas confondre avec Sabrina the Teenage Witch, cet opus fait également partie de l’univers des Archie Comics. Sabrina, moitié humaine et moitié sorcière, est confrontée à un choix déchirant à l’approche de son 16èmeanniversaire : Devenir une sorcière ou non. Dans cette version de ce spninoff, on relie le statut de sorcière au satanisme, qui comme toute religion monothéiste, est enclin à un patriarcat malsain. Sabrina réalise rapidement que quoique la sorcellerie lui apporte une certaine liberté, celle-ci à un prix et elle est très cher payé par les femmes.
En effet celles-ci sont rarement en position d’autorité et détiennent peu de liberté sur leur sort. Au cœur de sa crise d’adolescence, Sabrina décide de se battre pour le choix suivant : Celui de vivre sa vie comme bon lui semble puis de faire valoir ses désirs et ses besoins. Ce que Sabrina réussit surtout à faire est un pied de nez au dogme mené par l’agent masculine.
https://www.youtube.com/watch?v=P-p2B4YFLJE
Charmed reboot, Buffy the Vampire reboot et le phénomène du whitewashing witches
En parallèle avec le féminisme populaire, les sorcières dépeintes dans la culture populaire manquent d’intersectionnalité. Il est vrai que les deux dernières décennies nous ont donné des sorcières aux multiples identités, mais elles semblent toujours être en arrière-plan. En effet elles sont souvent destinées à nous faire rire, à jouer les acolytes, à être plus vilaines que les autres, ou à être offertes en sacrifice pour accomplir une quête. Le reboot de Charmed, a tenté cependant de changer le background des sœurs.
En effet les actrices sont respectivement métisse, Afro-Américaine et Afro-Latina. Puis, les spéculations concernant le personnage principale du reboot de Buffy, semblent nous faire croire qu’il pourrait être une Afro-Américain. Quoique ces changements amènent un certain rafraichissement, il faut espérer que ces nouveaux personnages soient plus riches et plus complexes.
Yes, this is a Witch Hunt. I’m a Witch, and I’m Hunting you.
Les sorcières ont certainement un long avenir dans la culture de masse et les consommatrices de cette culture n’ont jamais eu autant soif de pouvoir, de représentativité et de faire entendre leur voix. À mon sens, elles veulent voir des personnages féminins forts, maîtres de leur histoires et prompt à dénoncer les abus. Il est clair que les sorcières en tant que personnage, ont été et demeurent une pierre angulaire pour les femmes savantes et courageuses.
Il sera intéressant de voir dans l’avenir comment les auteurs feront évoluer ces créatures devant des consommatrices friandes de liberté et prêtes plus que jamais à faire valoir leurs opinions, leurs savoir et leurs histoires.
Pour en savoir davantage sur le sujet : Sorcières : la puissance invaincue des femmes, Mona Chollet, Édition Zones, 2018.